Le Testament
Le Testament est une imploration. Loin d'un hommage rendu à l'être aimé, Rilke y consigne les angoisses, phobies, souffrances, liées parfois à l'enfance et suscitées par l'amour. La douleur d'être aimé est générée selon le poète par un insupportable sentiment de se dissoudre, de s'abolir dans l'objet désiré. L'écrivain, privé de sa liberté créatrice, "se déclare à jamais malheureux", et mendie quelques rares instants d'une solitude bienfaitrice. Le paradoxe le plus insoutenable demeure sans doute la certitude selon laquelle l'oeuvre, une fois privée d'amour, souffrirait néanmoins d'une inconcevable "dureté, sécheresse, improductivité, lâcheté devant le fruit". Cette oeuvre torturée est née d'une immense frustration de l'écrivain praguois : l'élaboration des Élégies de Duino furent interrompues par la Première Guerre mondiale. En 1920, un nouvel amour freine une fois de plus sa créativité, ce qui le plonge dans un profond désespoir. Ces notes, parues sous le titre du Testament furent initialement un ensemble de lettres, restées longtemps secrètes. --Laure Anciel