Le déménagement
On va vivre à neuf ! s'était-il écrié quand ils étaient revenus d'avoir signé les papiers pour le nouvel appartement.
Vivre à neuf ! Est-ce qu'on vit jamais à neuf ?
Il n'était pourtant pas déçu. Rien ne lui permettait de se plaindre, ni de penser qu'il s'était trompé dans son choix.
(...)
Il ouvrit la fenêtre et aperçut, en face, à trente mètres au moins, un immeuble blanc tout pareil au leur. "
(Source : Presses de la Cité)
Emile Jovis quitte le vieil appartement de la rue des Francs-Bourgeois où il demeurait depuis des années, pour s'installer, avec les siens, à Clairevie, lotissement moderne de la banlieue. De cette nouvelle installation, Jovis se promet beaucoup de bonheur. Bientôt, il doit convenir que Clairevie, où chacun s'isole dans un anonymat sans âme, ne remplace que difficilement l'environnement humain de Paris. Par ailleurs, Jovis fait, à la faveur d'une cloison mal insonorisée, une singulière découverte. Son voisin, Jean Farran, appartient au milieu, il tient une boîte à strip-tease près des Champs-Elysées et est mêlé à un gang de voleurs de voitures. Chaque nuit, Jovis recueille à travers la cloison des échos de la vie la plus intime de Farran et de sa compagne, ainsi que des indications sur les menées du gangster. C'est pour lui une puissante révélation que celle de la vie criminelle, de la perversité, de l'impudeur. Il est comme fasciné et n'a de cesse d'en savoir plus. Un soir, il se rend au « Carillon », la boite de Farran. Tandis qu'une entraîneuse le soûle et s'offre à lui, Emile a l'impression, dans ce bar, d'être pris dans une sorte de piège, alors qu'on en veut tout simplement à son argent. Par défi, mais aussi pour affirmer une « liberté » soudain conquise, Jovis va se mettre à parler imprudemment, montrant qu'il est au courant de certaines choses. Quand il sortira du cabaret, une rafale de mitraillette l'abattra sur le trottoir : il mourra en demandant pardon aux siens.
(Source : éditions Omnibus)
Année de première parution : 1967.