Pénétrer dans l'univers d'Antonia S. Byatt est en soi une aventure, tant l'auteur explore de manière inhabituelle les territoires de la société britannique en exprimant la fragilité des choses et le temps suspendu. Une femme qui siffle, où l'on retrouve avec quelques années de plus l'héroïne de La Vierge dans le jardin, Frederica Potter, n'échappe pas à la règle de la romancière. Il y a ici ceux qui veulent changer le monde, ceux qui attendent avec impatience une libération dionysiaque, et autour d'eux des femmes libres qui ont un travail qu'elles ont choisi, une vie de l'esprit et une vie sexuelle à leur guise. Comme à son habitude, Antonia S. Byatt offre une imposante galerie de personnages en quête d'eux-mêmes et de nouvelles valeurs, entrecroisant les destins et nouant ses intrigues avec autant de minutie que d'érudition.

L'écrivain britannique brasse tous les thèmes, de Wittgenstein à l'anthroposophie en passant par la sexualité des escargots, la dyslexie, la génétique, la physiologie et la cognition, le charisme, la religion, la nouvelle spiritualité, la télévision, les communautés, les thérapies de groupe et la culture des années soixante.

Finement écrit, extrêmement documenté, Une femme qui siffle est une brillante analyse du communautarisme, de ses utopies, de sa contestation, de ses impasses comme ses dérives. Très à l'aise dans le réalisme psychologique, maîtrisant avec autant de brio le contexte historique et les différents domaines qu'elle aborde, A.S. Byatt possède la qualité des plus grands écrivains : celui de donner l'envie et le besoin de faire un bout de chemin avec ses personnages.