Télérama [HS n° 2] Cézanne
Le 15 octobre 1906, Paul Cézanne, alors âgé de soixante-sept ans, installé au sommet de la colline des Lauves surplombant Aix-en-Provence, peint son amour de toujours, la montagne Sainte-Victoire, lorsque la pluie survient. Il continue pourtant son oeuvre sous l'averse, et finit par s'évanouir. Il meurt huit jours plus tard d'une pleurésie. Cent ans donc, et la France reconnaissante célèbre son héros : 2006 est l'année Cézanne.
A cette occasion, le peintre retrouve son accent provençal. On se souvient qu'il naquit à Aix, qu'il arpenta la garrigue environnante, qu'il ne cessa de tourner autour d'une déesse de pierre blanchâtre bleuissant au soleil. Il n'en fut pas toujours ainsi : l'atelier des Lauves fut miraculeusement sauvé de la destruction en 1951, et une autoroute construite en 1970 traverse le Jas de Bouffan, l'ancienne propriété familiale.
Cézanne, le père de la peinture moderne, dit-on maintenant. Sans doute. Mais, à mesure que le temps passe, les poncifs sur son oeuvre s'effacent pour, un jour, espérons-le disparaître. Les théories cézaniennes, souvent contradictoires, et que leur auteur ne cessait de transgresser pour se soumettre à son intuition et à sa sensibilité, n'aveuglent plus que ceux que la liberté encore effraie Un siècle après sa mort, Paul Cézanne devient enfin ce qu'il rêvait d'être, un immense classique de son temps, à l'égal de ses idoles : Le Tintoret, Titien, Véronèse, Vélasquez, Poussin, Courbet ou Delacroix. Un siècle après sa mort, Cézanne est un héros
(Editorial de Olivier Cena).