Simplement compliqué
Avec un titre antinomique, Simplement compliqué est presque un monologue, celui d'un vieil acteur, "dénigreur de livres, corrupteur de science et démolisseur de caractères", qui martèle de ses sentences, jure contre une humanité rongée par le pouvoir. Retranché dans sa maison, univers étroit et vaste à la fois, obsédé par les souris et le poison à souris, il joue et rejoue le couronnement de Richard III et garde pour seule compagnie une petite fille qui lui apporte le lait deux fois par semaine. Car "les acteurs sont comme des enfants, c'est pourquoi nous nous entendons si bien". C'est un formidable marginal, confronté à l'échec et mis sur la touche, conscient que "l'art de l'acteur est un art qui tue". Dans Simplement compliqué surgit l'ordinaire de Bernhard, son quotidien, la hantise de la déchéance, physique et mentale, la ponctualité dont il "a fait une méthode", l'horreur de tout ce qui est scolaire et académique, enfin la volonté tenace de "tirer profit du désespoir". Une pièce magistrale, d'une violence froide et intellectuelle. --Céline Darner