Les Ciseaux
A 95 ans, Ernst Jünger cesse de s'interroger sur l'avenir de l'homme et du monde.
La préoccupation des origines n'est chez lui qu'un moyen de mieux élucider notre destin instable entre la matière et les dieux. Poursuivant une quête amorcée dès Le Travailleur et Le mur du temps, il utilise l'image des ciseaux pour séparer deux univers temporels : celui dont la mort constitue la conclusion abrupte, lorsque les ciseaux de la Parque ont tranché, et celui d'un au-delà concret, approché dans le rêve, le mythe, la prophétie et le don de seconde vue, où les ciseaux de la Parque se referment à vide sur l'intemporel. Avec son immense culture, Jünger modifie constamment les angles d'attaque, il passe de Saint Augustin aux Mille et une nuits avec une faculté d'émerveillement qui n'a d'égale que sa rigueur d'énonciation.
Mais son moindre mérite n'est pas de délivrer un message d'espoir : même si les dieux restent en attente dans un intérim angoissant. Dionysos demeure le seigneur de la fête.