Le 7 novembre 1966, Ernesto «Che» Guevara commence un nouveau journal de bord. Le légendaire héros révolutionnaire qui a mystérieusement disparu de la scène internationale depuis un an est arrivé incognito quatre jours plus tôt à La Paz sous un faux nom ; il s'apprête à gagner le maquis pour mener une guérilla de libération du continent sud-américain.

Pendant onze mois, Guevara note chaque jour la lente progression de sa troupe dans un environnement hostile, les rudes conditions de survie, les embuscades tendues à l'armée bolivienne, les guérilleros et compagnons qui périssent dans l'aventure, bientôt la solitude de son groupe coupé des autres et traqué par l'armée, jusqu'à sa dernière journée dans la Quebrada del Yuro.

Né en 1928 en Argentine, Ernesto Guevara, médecin, avenxadturier et révolutionnaire, est exécuté le 9 octobre 1967 dans la petite école de La Higuera sur ordre du président bolivien Barrientos. La veille, lors de sa capture, l'armée avait mis la main sur son journal dans son sac à dos. Pour la première fois dans son intégralité, cette édition comporte les pages alors confisquées et des photos inconnues de son combat dans les Andes.

Traduit de l'espagnol (Argentine) par Laurence Villaume.

Extrait du livre :

Une introduction nécessaire

par Fidel Castro

Tout au long de sa vie de guérilla, le Che garda l'habitude de reporter scrupuleusement, jour après jour, ses observations dans son journal personnel. Durant les longues marches sur des terrains abrupts et difficiles, au milieu des forêts humides, quand les files des hommes, courbés sous le poids des sacs à dos, des armes et des munitions, s'arrêtaient un instant pour se reposer, ou lorsque, à la fin d'une épuisante journée, l'ordre était donné à la colonne de faire halte pour dresser le camp, on voyait le Che - comme l'avaient baptisé affectueusement les Cubains depuis le début - sortir un petit carnet de sa poche et, de son écriture quasi illisible de médecin, noircir les feuilles de ses pattes de mouche.

Les notes qu'il a pu conserver lui servirent plus tard pour composer ses magnifiques récits historiques de la guerre révolutionnaire cubaine, riches de contenu révoxadlutionnaire, pédagogique et humain.

Pour ce qui est de cet ouvrage, grâce à son inlassable manie de noter les principaux événements de chaque journée, nous disposons d'une information détaillée, rigoureusement e¬te et d'une valeur inestimable des derniers mois héroïques de sa vie en Bolivie.

Ces notes, qui ne furent pas écrites en vue d'être publiées, lui servaient d'instrument de travail pour juger constamment les faits, les situations et les hommes, tout en permettant de donner libre cours à son esprit profondément observateur, analytique et bien souvent empreint d'un humour d'une rare finesse. Elles sont forxadmulées avec sobriété et sont d'une parfaite cohérence, du début à la fin.

N'oubliez pas qu'elles furent rédigées lors de précieux moments de repos alors qu'une lutte de cette nature, qui se déroulait dans des conditions matérielles d'une incroyable difficulté et imposait des efforts physiques surhumains et épiques, exigeait de lui une prise de responsabilité constante et éprouvante en tant que chef de détachement d'une guérilla qui en était encore à ses prémices. Preuve de plus, s'il en était besoin, de sa façon de travailler bien particulière et de sa volonté de fer.

De par son analyse minutieuse des incidents quoxadtidiens, ce journal témoigne de fautes, de critiques et de griefs, propres et inévitables au déroulement d'une guérilla révolutionnaire. Au sein d'un détachement guérillero, les remises en question doivent être permanentes, surtout lorsque celui-ci n'est encore qu'un petit noyau, souffrant d'un lourd désavantage matériel, et lorsqu'il est confronté à un ennemi infiniment supérieur en nombre ; dans ces conditions, la moindre négligence ou la faute la plus insignifiante peuvent se révéler fatales. Il est du devoir du chef de faire montre d'une exigence absolue et d'utiliser chacun des événements ou épisodes survenus, si insignifiants soient-ils, pour éduquer les combattants et futurs cadres de nouveaux détachements. (...)