Van Gogh, le suicidé de la société
Van Gogh, le suicidé de la société - Pour en finir avec le jugement de dieu - Le Théâtre de la cruauté - Lettres à propos de « Pour en finir avec le jugement de dieu »
Essai, poème, récit en partie autobiographique ? Van Gogh le suicidé de la société est tout aussi inclassable que les autres oeuvres d'Antonin Artaud. Disloquant les formes et les pratiques culturelles, subvertissant toutes les catégories, il ne peut être absorbé par aucune. Sollicité d'écrire un texte sur Vincent van Gogh à l'occasion de la grande exposition ouverte en janvier 1947 au musée de l'Orangerie, Antonin Artaud l'aurait peut-être fait, mais ce n'aurait sans doute pas été ce plaidoyer chaleureux et indigné s'il n'avait vu appliquer à van Gogh, par un certain docteur Beer, cette nomenclature " dépréciative " de la psychiatrie dont il ne pouvait supporter d'être lui-même l'objet. Sa solidarité, alors, va s'exercer à plein : " Je défendrai van Gogh par intérêt pour ma santé, je ménagerai partout ma santé et ma liberté. " Car, pour lui, tout psychiatre, qu'il ait nom Beer, L., Ferdière, ou tout " improvisé psychiatre ", tel le docteur Gachet, est avant tout " une sorte d'ennemi-né et inné de tout génie ". Et il faut dénoncer cette forme particulière de suicide à laquelle van Gogh, parmi d'autres, s'est vu contraint par une société punitive, celle même qui a incarcéré Antonin Artaud pendant neuf années dans ses asiles d'aliénés. Pour en finir avec le jugement de dieu, texte radiophonique commandé à Antonin Artaud, dans l'automne 1947, a bouleversé à tel point les règles du genre que sa diffusion, programmée pour le 2 février 1948, en fut interdite. Il a fallu attendre près de trente ans pour que le texte soit diffusé. Il n'en conserve pas moins aujourd'hui toute sa virulence. Le Théâtre de la cruauté, poème qui fait référence par son titre aux manifestes publiés en 1932 et 1933, écrit tout exprès en vue de cette émission dont il ne fut écarté que pour des raisons de minutage, a été joint à Pour en finir avec le jugement de dieu, ainsi que les lettres d'Antonin Artaud relatives à sa radiodiffusion.