Histoire de l'art
Des bas-reliefs de Thèbes à Bazaine, de Louxor à Vieira da Silva, d'une statue assise de Ramsès II à l'Unité d'habitation de Le Corbusier? L'histoire de l'art de Jacques Thuillier est celle du monde et de ses représentations à travers l'architecture, la peinture et la sculpture. Une histoire qui s'étend des premières affirmations artistiques en Égypte et au Proche-Orient à la reconquête humaniste, de l'âge du raffinement aux pouvoirs de la rhétorique, jusqu'aux temps des certitudes, illuminée par les images de l'armée enterrée de l'empereur Qin (huit mille fantassins reproduits en terre cuite !), le palais des papes à Avignon, la cathédrale de Reims, le Moïse de Michel Ange, une bacchanale du Titien, des reflets de Monet, les champs de blé de Van Gogh, une mandoline de Picasso, un nu de Balthus? À ses images multiples illustrant son histoire, Jacques Thuillier a ajouté son art de pédagogue, ses récits courts et efficaces, ses lumières convaincantes et simples (enseignées à la Sorbonne et au Collège de France). Il a voulu quitter le savoir encyclopédique pour l'histoire de l'art, traçant des chemins praticables dans la masse énorme des ?uvres et des faits. Tâche ingrate certes, qui oblige sans cesse à trancher, retrancher, choisir (peu de choses malheureusement sur Le Tintoret, si peu sur Giotto, rien sur Gillet?), mais tâche indispensable. Au final, c'est là une bible qui retient les faits principaux, replaçant l'art au centre du monde et rendant à la création sa part d'imprévisible. Avec un souci majeur : revenir aux ?uvres mêmes et à notre intuition devant les ?uvres, les laisser simplement parler, rendre au lecteur la simplicité du regard. La qualité eÎptionnelle des reproductions (loin de ce que l'on rencontre dans toute autre histoire de l'art) participe pleinement de ce souci de Jacques Thuillier. À la manière de James Ensor levant parfois les masques, on peut donc tirer son chapeau.--Céline Darner