Tout le monde n'a pas la chance d'être orphelin
Tout le monde n’a pas la chance d’être orphelin...» Que recouvre cette antiphrase caustique ? Ou plutôt qui se cache derrière ? Un père orphelin, survivant de la Shoah, s’adressant à sa fille. Marianne Rubinstein, l’adolescente d’alors, a été marquée par cette formule paradoxale. Des années plus tard, elle a voulu en sonder toute la complexité généalogique.
Les dizaines de milliers de Juifs français disparus pendant la guerre, ceux qui ne sont jamais revenus des camps d'extermination, ont «donné naissance» à une génération d'orphelins de la Shoah. Et ceux-ci ont à leur tour eu des enfants, fils et filles nés de parents orphelins. C'est à ces derniers que l'auteur de ce livre a choisi de donner la parole.
En marge de son travail universitaire, Marianne Rubinstein s'est efforcée pendant plusieurs années de recueillir les témoignages de cette «troisième génération». Elle a enregistré de nombreux entretiens qu'elle retranscrit ici, tout en leur adjoignant quelques notations sur la personnalité des interviewés. Cette quinzaine de portraits – dont elle a préservé l'anonymat – alternent aussi avec les souvenirs autobiographiques de l'auteur, indissociables de ceux de son père. Dans une intention plus littéraire ou musicale que strictement scientifique, Marianne Rubinstein développe une approche sensible que Serge Klarsfeld qualifie dans sa préface de nécessaire.