Odile l'été
Odile et moi, petites filles, courons dans le maquis qui entoure sa maison, elle habite à l’époque dans cette même grande villa à Cavalaire. Nous disparaissons des heures à la recherche d’un semblant de grotte planquée derrière un buisson de lentisque, une lampe torche à la main, et c’est là, pour la première fois, que nous inventons ce jeu qui nous tiendra en haleine jusqu’à la fin de notre adolescence – le petit copain et la petite copine. Au début, ces explorations n’interviennent que dans notre caverne ; l’obscurité et la fraîcheur nous préservent de ce que nous sommes en train de faire plus que du regard possible des autres. C’est une bulle dans laquelle nous nous fondons des heures entières, avant de ressortir comme si rien ne s’était passé, comme si nous venions de faire une partie de ballon, et nous n’en reparlons jamais, jusqu’à la fois d’après. »
La romancière Emma Becker, (La Maison, 2019, Flammarion, prix des étudiants France Culture-Télérama et L’Inconduite, 2022, Albin Michel), nous livre avec Odile l’été un récit initiatique aussi immoral qu’électrisant sur le thème du rapport de force et de la domination.
Dirigée par Vanessa Springora, la collection « Fauteuse de trouble » articule intimité et émancipation, érotisme et féminisme, corps et révolte, sexuel et textuel.