La Voix des mauvais jours et des chagrins rentrés
Aux environs de Paris (la roche Tarpéienne n’étant jamais bien loin du RER), un homme seul, venu là on ne sait trop dans quel but ou pour quel pèlerinage, observe la façade d’une résidence secondaire dont on comprend bientôt que la propriétaire l’a un jour sommé de déguerpir, ainsi d’ailleurs que de l’existence qu’elle et lui ont quelque temps donné le sentiment de partager.
À distance d’abord, il en scrute les volets clos, se demandant ce qu’ils cachent désormais et si, pour chacune des pièces, la rupture d’affection n’a pas eu simultanément pour corollaire un changement d’affectation. Ça tient parfois à un jeu de mots, l’existence. Le brouhaha de sa première rencontre avec la maîtresse des lieux, le souvenir des scènes (au propre ou au figuré) qu’en cette maison il vécut, l’évocation des parents ou amis qu’il y côtoya de plus ou moins près, tout cela lui revient en mémoire au fur et à mesure qu’il se rapproche et, après s’être assuré que la propriété est déserte, finit par pénétrer dans le jardin.
Là (tandis qu’il songe et songe encore aux circonstances de la folle journée où, perdu de réputation, sa répudiation lui fut signifiée entre cuisine, séjour et chambre à coucher), une porte entrouverte, et ce qu’il découvre derrière elle, consacre la rupture du bail et met à tout jamais un point final au récit.
J.-L.B. C’est du Benoziglio pur jus, plus grave ; d’un tempo plus lent, assourdi par la mélancolie, l’atteinte violente du temps passé et de l’amour évanoui. On y retrouve l’écriture de cet auteur inclassable qui a publié tous ses livres au Seuil (c’est son douzième roman). Quelqu’un bis est mort est de 1972, Cabinet portrait (prix Médicis) est de 1980.