Je voulais être marin, missionnaire ou brigand
La vraie charité ne consiste pas à pleurer ou simplement à donner, mais à agir contre l'injustice." Père des pauvres, fondateur d'Emmaüs, infatigable révolté, l'Abbé Pierre, à 90 ans, a encore quelque chose à nous apprendre. Ses carnets intimes inédits nous entraînent sur la (longue) route de ses combats, de ses colères, de ses luttes. Depuis son enfance où il était encore le petit Henry Grouès, le "castor méditatif" des scouts, jusqu'à l'homme emblématique de maintenant, c'est toute une vie dédiée à l'être humain qui défile au long des quelque 225 pages. Une vie riche d'amour et de générosité. Ses doutes d'adolescent, ses souffrances solitaires puis sa foi, inébranlable en Dieu et en la dignité humaine, ses rencontres avec la classe politique (Mendès France, de Gaulle...), les artistes (Camus ou Coluche "véritable communiant"), ses interrogations permanentes... l'abbé Pierre que l'on connaît, que l'on imagine est là. Généreux, entier, fidèle à lui-même et à ses convictions, l'homme a tout vécu : la guerre et son entrée en Résistance, la création d'Emmaüs en 1947 et la rencontre avec le premier compagnon, Georges, son combat pour propager cet idéal à travers le monde, son naufrage en Amérique du Sud où on l'a cru mort, son engagement auprès des défavorisés, des pauvres, des immigrés... Voilà toute une vie de combat. Alors, oui, l'abbé a beaucoup à dire. Il a vécu l'arrivée de la pilule, la désertion des églises, les luttes du Tiers-Monde, le RMI... il a été de toutes les causes. Honnête, il revient aussi sur le "scandale Garaudy", quand il avait soutenu le philosophe aux thèses quasi négationnistes, et revient ainsi sur ses erreurs.Ce témoignage riche, passionnant, touche la corde sensible, car il nous parle, finalement, d'un homme comme les autres. Pas de Dieu, ni d'un surhomme mais d'un homme aux doutes, aux erreurs et aux idéaux forts. Tendant toujours vers un seul but : redonner la dignité à ceux qui l'ont perdue et leur rendre justice.