Chaque aube tient parole
Illustrations de Martine Mellinette.
1988.
Les bœufs
Dans la chaude étable d’hiver
Ils ruminent la paille des songes,
Le foin crissant d’un autre été.
Dans leurs yeux somnolents passent
La même prairie d’herbe grasse,
L’ombrage bleu près du ruisseau
Et ce sillon qu’il faut sans fin,
A pas très lents dans les brumes d’octobre,
Traîner jusqu’en haut du coteau.
Parfois l’un tire sur sa chaîne
Comme si l’aube à la lucarne
S’impatientait déjà.
L’autre, du mufle, écarte les étoiles
Avant de boire à longs traits le silence
A l’abreuvoir de la nuit.