Boy, Snow, Bird
Personne ne m’avait jamais prévenue au sujet des miroirs, de sorte que je les ai appréciés durant longtemps, les croyant fiables. Je me cachais entre eux en en plaçant deux face à face de sorte que, debout au milieu, j’étais réfléchie à l’infini dans l’un et l’autre sens. Beaucoup, beaucoup de moi. Quand je me dressais sur la pointe des pieds nous étions toutes dressées sur la pointe des pieds, a tacher de voir la première d’entre nous, et la dernière. L’effet était vertigineux, une immense pulsation, pas tout à fait vivante, tenant plus du fonctionnement de l’automate. Je ressentais le reflet sur mon épaule comme un tapotement. J’étais avec lui dans les termes les plus intimes, comme n’importe quelle petite nouille trop seule pour être difficile avec ses fréquentations. »
New York, 1950, elle a vingt ans quand elle fuit un père qui la maltraite. Elle s’appelle Boy Novak. Arrivée dans une petite ville du Massachusetts, elle fait la connaissance d’Arturo Whitman, qui vit avec son étrange petite fille, Snow. Boy épouse Arturo. Tout semble aller bien, jusqu’au jour où ils mettent au monde leur fille, Bird, un très beau bébé « de couleur ». Ainsi la naissance de Bird met-elle au jour les origines afro-américaines des membres de la famille Whitman, jusqu’alors passées inaperçues à cause de la blancheur de leur peau. Une belle-mère, une jeune Snow, des miroirs, tous les éléments sont dès lors réunis pour une habile réécriture d’un conte bien connu.
Avec Boy, Snow, Bird, Helen Oyeyemi braque le projecteur sur les absurdités qui ont accompagné l’histoire raciale aux États-Unis. Avec habileté, elle soulève la question de ce qui nous identifie : couleur, gène, histoire, culture ?