Mon livre surprise
Way Inn
Il a la tête de l'emploi et le nom de son métier : Double. Neil Double. Agent anonyme chargé de remplacer les hommes d'affaires lors de salons auxquels personne ne souhaite se rendre, ce professionnel de la doublure passe sa vie entre hôtels de chaînes internationales et conventions en tous genres, logé de chambre en chambre au gré de ses déplacements. Et il aime ça. Une petite routine sans histoires où les draps sont propres et sans pli, où les savonnettes sont livrées sous emballage plastique sur le rebord de la baignoire et où le sourire ultra-bright des employés accompagne chaque service commandé en temps et heure. Dans ce schéma policé, Neil Double n'a à s'occuper de rien en dehors de son travail, dans les méga-centres de congrès. Il ne s'en plaint pas, car les nombreux avantages qu'il retire de la situation le satisfont au mieux. D'ailleurs, il aurait pu continuer longtemps ainsi, à profiter d'aventures sans lendemain, des serviettes chaudes et repassées et de petits-déjeuners continentaux passés à bavarder avec ceux qui le prennent pour un confrère ou un concurrent sur les salons. Oui, il aurait pu, lui qui ne commet jamais d'impair. Mais il faut qu'un grain de sel, fatalement, enraye un jour cette mécanique trop bien réglée. Expulsé du congrès des organisateurs de congrès, Neil Double deviendra la cible de la machinerie administrative et sera précipité dans un broyeur aux accents kafkaïens. Victime à son insu, tel le protagoniste de Brazil, il ne pourra plus ignorer le labyrinthe de l'hôtel qui s'étend au-delà du réel ni ses inquiétantes énigmes... Après Attention au parquet !, Will Wiles dépeint dans Way Inn un univers professionnel, sans frontières ni aspérités ; il démonte - et détraque - les rouages de notre société de consommation avec la minutie d'un Bret Easton Ellis. À travers le parcours de son héros moulé dans sa routine bien rodée, répétant une existence parfaitement maîtrisée, l'auteur ne se contente pas de mettre en scène les absurdités de cette comédie humaine, il nous plonge dans un roman qui se fait de plus en plus délirant, surréaliste, jusqu'à basculer dans le fantastique. Devenu cauchemardesque tout en demeurant drôle, ce séjour dans l'antre du conformisme est un ingénieux objet littéraire, original et corrosif.