Medea
Pascal Quignard nous livre sa propre version de Médée, inspirée de la tragédie d’Euripide et de deux des fresques représentant l’héroïne au musée archéologique national de Naples, la principale étant celle où elle se tient, le glaive à la main, prête à commettre le meurtre de ses enfants. Comme la majorité des textes de Pascal Quignard, Medea mêle érudition, réflexion et témoignage. L’auteur reprend les principaux épisodes de la tragédie de Médée tout en entraînant le lecteur dans les ténèbres de sa propre histoire. Qui est cette femme, dont je tombe, la force d’évocation de ce vers, noeud du livre, révèle le pouvoir des mots quand ils sont animés par la pensée d’un très grand écrivain. À travers ce conte mythologique, solaire et d’une densité eÎptionnelle, Pascal Quignard renoue avec les plus belles pages du premier volume du Dernier royaume : Les Ombres errantes. L’histoire de Médée, figure féminine de l’obscurité et de l’inquiétude, compte parmi les mythes grecs les plus sombres. Elle est celle qui tue son frère pour Jason. Puis, répudié par ce dernier, elle supprime sa rivale en lui offrant une tunique empoisonnée. Expulsée hors de la cité et rejetée de tous, Médée tue alors de ses mains les enfants qu’elle eut avec Jason. Cette dimension monstrueuse et transgressive, cet effroi lié à un acte qui brise toutes les lois de la cité, fait de Médée une véritable figure de l’altérité. C’est cet aspect du personnage qui intéresse Pascal Quignard. Comment exprimer cette douleur et cette détresse pleinement humaine ? Le texte incisif et dépouillé dit l’amour et la préméditation, l’effroi, le caractère complexe et contradictoire de cette femme qui représente à la fois l’humanité à travers sa passion et l’inhumanité par ses actes.