Ciel en feu
Qu'importe que ce soit une maladie, une tension anormale... » qui donne lieu à la plus grande beauté ! Tel est l'avertissement que nous lance Mario de Sá-Carneiro à propos de « Ciel en feu », en y plaçant en exergue une phrase empruntée à « L'Idiot ». Qu'importe, en effet : rarement, dans le ciel de la littérature, des textes aussi beaux, aussi incandescents auront été allumés, que ces nouvelles écrites au début du siècle par un auteur qui, à l'âge de vingt-six ans, mit fin par son suicide à une « tension anormale ». Placardés dans le ciel de Dostoïevsky et de Nerval, ces « soleils noirs » sont des textes de crise, les journaux urgents et convulsifs d'un mois vécu totalement comme une crise et qui ne résout son énigme qu'en se consumant, paragraphe après paragraphe. Est-il possible, au sein de l'astre Sá-Carneiro, de repérer la révélation homosexuelle, foyer de cette crise ? Peut-être. Dans « L'Ombre absolue », première nouvelle du recueil, elle se produit d'une manière particulièrement significative : c'est le meurtre du « corps liturgique » de la femme, dont la mort s'incarnera dans la personne d'un homme mystérieux. Mais cette expérience n'est, somme toute, que le prétexte à mener la « tension » jusqu'au point extrême où se révèlent et se confondent enfin, dans une matière extraordinairement brûlante, le Mystère, la Mort et la Beauté – véritable « chair du Secret ». Plus que tout autre, Mário de Sá-Carneiro a atteint ce que l'Art seul nous autorise.