Mon livre surprise
Ôter les masques, d'après Shining de Stephen King
Nous ne comprenons rien à ce qui se passe car ce qui se passe est toujours le produit d'un passé fantôme et protéiforme. » C'est ce qui se trame dans les couloirs de l'hôtel Overlook, c'est ce qui se trame dans nos propres vies ; nous sommes encombrés de fantômes, d'approximatives connaissances de l'histoire, de faux-semblant. Nous bâtissons sur les sables instables de nos enfances et des existences qui nous ont précédés. Une grande part du passé porte un masque, il est réinventé, discontinu, souvent flou. Ce livre ne sera pas un livre sur les fantômes, sur le surnaturel. Il sera un livre sur ce qui hante, ce qui hante l'enfance, hante l'écriture. Il sera un livre sur ce que voit l'écrivain Jack Torrance dans les couloirs de l'hôtel Overlook. Certains pensent que les fantômes viennent du dehors, d'un au-delà de nos perceptions, je reste tristement persuadé qu'ils sont contenus à l'intérieur de nos crânes. Écrire sur Shining, c'est aussi partir à l'exploration de mes fantômes intimes, ceux qui me hantent, de texte en texte. Tous les sens de ce mot m'intéressent : l'apparition surnaturelle, le souvenir qui obsède la mémoire, la chimère, mais aussi la petite fiche qui -autrefois - marquait la place d'un livre manquant dans une bibliothèque. Shining est un livre fantôme, un livre que j'ai lu jeune. Il est inscrit dans le registre de ma bibliothèque mentale : me pencher de nouveau sur lui, c'est entrer dans la généalogie de mes lectures, faire le tri parmi ces fantômes de livres.