Les enfants du soleil
Le Mot de l'éditeur : Les enfants du soleil
JADIS, un morceau infime et infirme d'albumine a jailli sous le soleil vers la vie, il s'est multiplié, il s'est décomposé en aigle, en lion, et en homme ; viendra le temps et, de nous, les hommes, de tous les hommes, surgira à la vie un organisme puissant et plein de majesté - l'humanité ! L'humanité, mes amis ! Alors, toutes les cellules auront un passé plein des grandes conquêtes de la pensée, - plein de notre travail ! Le présent - c'est un travail libre, commun pour la jouissance par le travail, et, le futur - je le pressens, je le vois - il est splendide. L'humanité grandit et mûrit. Voilà la vie, voilà son sens !
Une vieille maison de maître. Une grande salle, dans la pénombre ; sur son mur gauche, une fenêtre et une porte donnant sur la terrasse ; dans un coin - un escalier menant à l'étage, où habite Liza ; au fond de la salle, une porte en arche ouvrant sur la salle à manger ; dans le coin droit - la porte menant chez Éléna. Des bibliothèques, des meubles lourds, anciens ; sur les tables, des éditions précieuses ; sur les murs, des portraits de savants naturalistes. Sur une bibliothèque, un buste. À la fenêtre de gauche - une grande table ronde ; Protassov est attablé devant, feuilletant une brochure, et regarde une cornue remplie d'une espèce de liquide jaunâtre qui chauffe sur une petite lampe à alcool. Sur la terrasse, sous la fenêtre, Roman, qui, tout en s'affairant, chante une chanson à voix basse et monotone. C'est ce chant qui joue sur les nerfs de Protassov.
PROTASSOV. - Dites, le gardien !
ROMAN, à la fenêtre. - De quoi ?
PROTASSOV. - Si vous partiez... hein ?
ROMAN. - Où ça ?