Le monde désert
Lorsque le fils du pasteur Isaac de Todi sortait de son état chronique de rêverie pour constater que le monde extérieur, la "campagne" de son père à Genève, était coloré de telle ou telle façon par la pluie ou le beau temps, selon la saison et le jour et surtout l'imprévu de son âme à lui, il aimait descendre les trois marches basses du perron, hors du triste vestibule solennel, prendre ensuite à travers la grande pelouse, et même si elle était recouverte de neige, laissant de côté la "salle des marroniers" qui respirait la tristesse ; la pelouse allait en pente molle parsemée de hêtres, de charmes qui étaient comme jetés sur la terre ; franchir enfin la passerelle de fer qui enjambe légèrement la route de Cologny, et après avoir dégringolé en sautant plusieurs petits escaliers, parvenir à son domaine. »
Ainsi débute Le monde désert, récit construit de monologues où tour à tour les héros soliloquent et se répondent sur un rythme haletant. Des lambeaux de vérité apparaissent, se déforment, se déchirent comme des nuées d'orages.
L'amour se fixe sur de faux objets, bute sur la mort, mais, s'il consent à la perte, peut-être trouvera-t-il une voie libératrice.