Le livre des snobs
Thackeray publia d'abord son inénarrable catalogue satirique des snobs de son pays sous forme de chroniques hebdomadaires dans le magazine Punch, en 1846-1847.
Ses portraits désopilants commencent par le snob royal pour passer aux snobs aristocrates, snobs de la City, snobs militaires et ecclésiastiques, snobs littéraires, snobs des clubs, et encore bien d'autres variétés de l'espèce. Les snobs sont toujours parmi nous et l'un des plaisirs qu'offre aujourd'hui la verve étincelante de Thackeray est de reconnaître sous sa plume les imbuvables ancêtres de cette race immortelle que nous côtoyons journellement.
Peut-être, après tout, n'y a-t-il pas de meilleur ami du conservatisme que le snob radical acharné. Quand un homme vous harangue pour vous expliquer que tous les nobles sont des tyrans, tous les clergymen des hypocrites et des menteurs, tous les capitalistes des canailles, ligués ensemble dans un complot infâme pour priver le peuple de ses droits, il déclenche un revirement total des sentiments en faveur de ceux qu'il dénigre ainsi et, mû par un sentiment d'équité, le cœur généreux prend le parti de l'objet de cette injuste oppression.
C'est à cela que servent les snobs radicaux, à donner aux gens honnêtes l'envie de venir au secours des persécutés; et, si le monde continue d'évoluer comme il le fait, c'est-à-dire avec le peuple écrasant tout sur son passage et l'aristocratie toujours vaincue après un honteux simulacre de bataille, l'Eglise terrassée, la révolution triomphante, eh bien, oui, le vieux Punch se retrouvera dans l'opposition, selon sa bonne habitude.
La présente édition est la première traduction intégrale en français du chef-d'œuvre de Thackeray, avec les gravures originales de l'auteur.