Le héros et martyre de ce roman apparait au lecteur dans l'exercice de ses terribles fonctions : celles de bourreau. Un journaliste, témoin de l'exécution capitale est fasciné par la personnalité de l'homme de justice. Au cours d'une longue nuit, le bourreau se prête affablement à l'interview et se raconte. Fils naturel d'une villageoise,il a été porté tôt par l'ambition d'échapper à sa condition. Brillant, intelligent, doué pour les arts, il a quitté son village à la suite d'un grand amour adolescent qui a tourné à la tragédie. Suit une série d'aventures, de rencontres qui, de couvent de province en prison madrilène, de maisons closes en cirque ambulant, de terre de révolte en demeures seigneuriales constituent autant d'années d'apprentissage. S'il a fini par devenir homme de justice, c'est par un de ces enchainements en apparence paradoxaux, propres au destin de ceux qui ressentent si violemment le drame de l'existence, qu'il ne leur reste que le désespoir de se jeter dans les extrêmes...

L'art étonnant de Sender est de passer du simple récit, dans sa sécheresse, à de grandes fugues visionnaires. Si l'on doit essayer de caractériser, un nom, une analogie s'impose : c'est Goya fait écrivain.