La statue mutilée
Les conventions ne sont rien d'autre que les règles du jeu de la vie en société, mais il arrive qu'elles deviennent trop contraignantes pour les joueurs et qu'elles faussent le sens de la partie, En a-t-elle seulement un ? La question s'inscrit en filigrane dans la plupart des nouvelles de ce recueil et, notamment, dans celle qui lui donne son titre : La Statue mutilée. A quoi rime de créer un homme pareil à une sculpture antique, d'en faire un boxeur pour, ensuite, lui couper le bras ? Privé de sa raison d'exister, il ne peut que sombrer, faute d'avoir la foi de la chatte de Malédiction, dont la fin démontre tout autant que la sienne l'inutile cruauté du sort. Pour quelques-uns qui acceptent d'aller jusqu'au bout d'eux-mêmes comme le masseur noir et son partenaire, combien restent captifs d'une éducation qui les empêche de choisir la voie du champ des enfants bleus ? Car pour un couple qui découvre La Chose importante, trop de Miss Gelkes ne goûtent à la vie qu'à leur corps défendant (La Nuit où l'on prit un iguane). Et les plus purs, les mieux doués se réfugient dans un univers de rêve pour échapper à une réalité qui les effraie (Portrait d'une jeune tille en verre) au lieu de la dominer comme Alma dans L'Oiseau jaune. Tels sont les principaux thèmes de ce recueil qui illustrent l'art et la philosophie de Tennessee Williams.