La Femme du premier ministre
«Je ne dis pas que les hommes ont tort de porter leur regard au-delà de leur femme, de leur maison et de leur terre. Il y a de la grandeur à s'intéresser à la gloire de son pays, au bien de son peuple, plus encore aux horizons inconnus ou à l'avenir de l'humanité.Je ne dis pas non plus que les femmes ont tort quand elles vouent leur vie à un être entre tous, faisant de lui leur monde, leur océan, leur futur, et se refusant à le comparer à qui que ce soit. Aimer, c'est peut-être tout simplement cesser de comparer. Et il y a quelque chose de divin dans cette sacralisation d'un être qui ne le méritait pas plus qu'un autre, ni moins, si l'on croit que tout homme est sacré.Mais il se mêle à ce goût des hommes pour les horizons vastes et pour les ciels nouveaux tant d'insatisfaction de son lot, de sa propre personne et de son vis-à-vis, quel qu'il soit, tant de refus de ses limites et de volonté de puissance, tant de haine de la réalité, tant d'enfantillage, en un mot...Et il y a dans le penchant des femmes pour la fidélité un souci de sécurité, un refus de s'aventurer et un désir de posséder - ses clés, son jardin, son époux - qui s'apparente à un refus non moins enfantin de perdre, de manquer, en un mot de la mort.»