Des Jours et des nuits à Chartres
La photo, prise dans une des rues principales de Chartres, représente une jeune femme tondue. Parmi les autres personnes qui y figurent, certaines sont identifiables. D’autres ne sont que des silhouettes. Hors cadre, d’autres habitants de la ville assistent à l’humiliation de Simone. Simone était une « fille à soldats ». Dans ses bras, elle porte l’enfant qu’elle a eu avec un Allemand. La photographie est prise au moment où on la conduit en prison, où elle attendra son procès. Parmi les gens figurant sur la photo, beaucoup souhaitaient l’exécution de Simone. Si elle y a échappé, c’est grâce à l’éthique des dirigeants chartrains de la Résistance, qui s’opposaient à tout lynchage. Simone ne fut pas exécutée. Mais elle fut condamnée. Elle mourut dans les années soixante, détruite par l’alcool. Elle avait changé de nom, mais tout le monde connaissait son identité.
Cette pièce raconte son histoire, tout en prenant quelques libertés avec les faits. J’ai changé certains détails, ajouté certaines scènes, mais pour l’essentiel les événements se sont déroulés tels que je les montre. Cependant, la pièce parle aussi de moi, et de tous ceux qui ont un jour regardé la photo de Robert Capa. En d’autres termes, la pièce reflète le monde terrible et l’époque dangereuse dans lesquels nous vivons. » Henning Mankell
(Source: France Culture)