Défaut d'origine
Après le succès de L’Agrume de Valérie Mréjen en 2001 et de Rapport sur moi de Grégoire Bouillier en 2002, les perspicaces éditions Allia vont-elle de nouveau tirer leur épingle du jeu au sein de cette torrentielle rentrée littéraire 2003 avec Défaut d’origine, court premier roman d’un jeune homme de 30 ans, Olivier Rohe ? S’il faut bien sûr attendre pour savoir si le public sera réceptif à ce texte dense, assez difficile, placé sous les auspices de l’écrivain autrichien Thomas Bernhard, on peut déjà annoncer un livre énigmatique, qui risque de surprendre, notamment en raison du caractère asphyxiant de sa langue.
Cette langue, parlons-en. Elle est l’expression du mode de pensée circulaire, répétitif, lancinant, du narrateur, le mystérieux Selber, homme embarqué à bord d’un avion à destination de son pays natal, terre marquée par l’abomination de la guerre, et qui peu à peu se laisse dévorer par le discours d’un ami dont il se souvient, un certain Roman. Roman, nous ne le rencontrerons pas en tant que tel. Nous ne ferons que recevoir sa voix, qui, peu à peu, va se substituer à celle de l’homme qui la répercute.
Une allégorie de la création littéraire formerait-elle l’horizon de ce vol sans escale à la géographie indécise, peut-être plus mentale que physique ? Au regard des citations de Novalis, de Karl Kraus et de Gilles Deleuze qui ouvrent le texte, on peut se poser des questions… auxquelles nous ne répondrons pas, pour ne pas dévoiler le fin mot de cette histoire, le fin mot de l’origine de cette histoire, le fin mot du défaut d’origine de cette histoire.