Cinéma muet avec battements de coeur
Le cycle romanesque Kornel Esti (1933), son chef-d’oeuvre, tel qu’il a été recomposé à partir d’une quarantaine de nouvelles disséminées, peut être considéré comme le fruit de cette réflexion. La série plus instinctive de "griffonnages" rassemblés dans Cinéma Muet, en est un autre. Traits de plumes, extraits de bloc-notes, fragments de journal, réflexions morales, micro fictions, poèmes en prose, ces cinquante-trois textes, "sans tours de passe passe", nous entretiennent en bloc des affaires de la vie et s’étonnent tendrement, non sans humour parfois, devant la poignante, la grande fabrique, le cinéma muet du désespoir quotidien. Leur sujet est essentiellement humain, leur caractère souvent paradoxal, leur point de départ presque toujours anodin ; ce que l’auteur a vécu hier, aperçu ou contemplé dans la rue, une mendiante, un bonhomme de neige, le manège d’une mouche, ce dont il a rêvé, la mort de son stylo, le serrement de coeur qu’il a eu un jour dans son enfance, des "banalités jamais usées".