Mon livre surprise
Les Premiers temps
Sylvestre n’a pas bonne réputation. Bien qu’il ait passé depuis longtemps l’âge de faire des bêtises, chacun se demande si le vieux hors-la-loi, qui n’en a jamais été à une folie près, saura tenir en main son propre fils, arrivé à l’âge des mauvais coups et des amours imprudentes. Comme par un fait exprès, ledit fils s’amourache d’une fille qui n’est pas de sa condition, une de ces beautés inaccessibles qui finissent dans les bras d’un assureur ou d’un pharmacien, pas dans ceux d’un galvaudeux – rejeton au surplus d’un célèbre propre à rien. Mais c’est sans compter sur les décrets du ciel, fâché souvent avec l’humaine raison, et qui n’a pas toujours la même façon d’envisager ce qui est folie, ce qui est sagesse. Comment savoir ? – Rien à savoir sans doute. Sinon telle manière de suivre le cours des choses en gardant confiance, même si tout indique qu’on a pris le mauvais chemin.
Un roman qui a fait date dans la carrière de Dhôtel (publié en 1953, soit deux ans avant "Le Pays où l’on n’arrive jamais") : où apparaît l’une des premières figures de ces dévoyés magnifiques qui nous enseignent leur drôle de sapience en épuisant toutes les ressources de l’ordinaire calamité.
"Les Premiers temps", un roman d'André DHÔTEL, Gallimard, 1953, 280 pages ; réédition Phébus, collection "libretto", 2004, 288 pages.